jeudi 25 septembre 2008

Lago Uru-Uru



Fuyant la folie urbaine sud americaine, on decide d'aller camper au bord du Lac Uru-Uru, proche d'Oruro. Apres plusieurs mauvaises indications (mais c'est gentil quand meme), on trouve la rue d'ou part le bus pour Machacamarca, au Sud d'Oruro. On embarque avec les papachos et les mamachos de la campagne pour ce petit bled dont le nom nous pose quelques problemes au debut. Camacharca? Maracharcama? Mamaracarcha? Essayez, vous verrez. Don Simon, un pepe rencontre dans le bus, nous envoie au musee ferroviaire qui consiste en un tour dans la vieille gare abandonnee, et nous dit qu'en marchant tout droit vers le soleil couchant, on arrivera vite au lac! Faut croire que les boliviens ne sont pas presses, on arrive au lac apres deux heures de marche. Tout autour de Machacamarca, le paysage est desolant, c'est une belle decharge publique de bouteilles et canettes vides et de liquides chimiques qui donnent a la terre une sale couleur orangee. Assez desolant, mais assez vite on sort de tout ca pour rentrer dans la steppe de l'altiplano, se piquant les jambes sur l'herbe jaune (parce que bien sur, on a pas trouve le chemin. Peut etre pour ca qu'on a mis deux heures, d'ailleurs). Bref, on arrive au bord du lac et plante la tente a cote d'une espece de ruine qu'on distingue dans le noir, sans savoir qu'elle restera plantee la une bonne semaine.

Au reveil, on prends connaissance des environs. Le lac a l'Ouest, Machacamarca a l'Est, Oruro au Nord (dont on voit les lumieres la nuit) et au Sud, l'altiplano. On ne peut pas se baigner dans le lac, le fond etant constitue d'une espece de boue noiratre et collante, et il faut marcher quelques 500 metres pour arriver a une profondeur minime. Les pecheurs arrivent tot le matin en velo, de Machacamarca, et passent la journee entiere sur leurs barques, dans une tranquillite sereine, caches au milieu des joncs. Ils pechent des petits poissons que leurs femmes vont ensuite vendre a Oruro. L'un d'eux, curieux, vient nous parler, et nous offre de l'eau et du pain pour nous eviter un aller retour au village.

Je crois que c'est le deuxieme jour qu'on rencontre Doña Cristina. Comme tous les jours, elle sort ses moutons, mais ce jour la sera different, parce qu'on l'invite a s'asseoir avec nous. Doña Cristina est nee et a passe son enfance pres d'ici, dans une maison un peu a droite de la colline, la bas. Son pere meurt frappe la foudre, un soir qu'il se rends au village pour inscrire ses filles a l'ecole. Elle et ses six soeurs restent alors a la maison, pour aider leur mere avec les vaches, les moutons et les lamas. Se mariant chacune a son tour, les filles quittent la maison et la campagne. Doña Cristina part vivre a Oruro avec son mari, travaillant comme cuisiniere. Il y a trois ans, quand est mort son mari, elle a decide de revenir a la campagne et s'est achete une trentaine de moutons. Aujourd'hui, elle a plus de deux cent moutons, et treize vaches.
Trois ans qu'elle s'occupe de son troupeau, le sortant chaque jour brouter et se desalterer. Trois ans qu'elle vit nomade, changeant de maison toutes les deux-trois semaines, quand il n'y a plus d'herbe a brouter.

Le premier jour on discute, de tout, de rien, de sa vie, de la notre, de nos pays. Le jour d'apres, elle nous invite a venir avec elle, vers les moutons qui se sont deja eloignes, se dirigeant vers le lac, pour boire un coup. On lui tient compagnie quelques heures, apprenant a faire du crochet tout en surveillant le troupeau, assis dans l'herbe rase de l'altiplano venteux, sous le soleil tapant. Pas un nuage. Pas un bruit, seulement le vent et le belement des moutons. Il faut ensuite aller tirer de l'eau au puits, pour donner a boire aux brebis. Doña Cristina reve d'une pompe et d'abreuvoirs en metal, mais comme elle change de puits une ou deux fois par mois, a quoi bon? Ce jour-la, elle peut se reposer, c'est moi qui sors l'eau du puits, et Seba se fait une joie d'aller chercher les brebis, jouant au berger avec son baton. Ce soir la, on lui ramene meme ses vaches, ca fait trois nuits qu'elles passent pres de la tente, ne rentrant pas a la maison apres avoir passe la journee entiere dans le lac a manger des joncs. Les taureaux nous font un peu peur mais a force de cris et de coups de batons par terre on arrive chez Doña Cristina sans s'etre fait manger. Les brebis sont deja dans leur enclot. Pour nous remercier, Doña Cristina nous invite a boire un mate de coca au chaud. C'est que des que le soleil se couche, le froid tombe d'un seul coup, penetrant les entrailles. On papote a la lumiere d'une bougie, dans la vieille maison que loue Doña Cristina, ou s'entasse sacs de laine, tripes de moutons et bidons de toutes tailles sous le toit de paille perce. Dehors, les chiens veillent, le belement des brebis se calme, le vent souffle fort, il va pleuvoir.

Le lendemain, Doña Cristina nous ouvre l'appetit en nous premettant un barbecue d'agneau. Pour ca, elle doit aller faire des courses a Oruro, et a besoin de quelqu'un pour lui garder les brebis. On passe donc une journee entiere tous seuls, a s'occuper du troupeau, l'emmener au puits, le rentrer dans l'enclos le soir. Le vent ne souffle pas ce jour la, la chaleur est asphixiante et l'ombre inexistante. Quand Seba va remplir les abreuvoirs, je m'occupe de lui amener le troupeau. Etre berger, ce n'est pas si simple que ca, en realite. C'est que deux cents moutons, ca s'etale sur une grande distance. Il faut faire tout le tour et les guider dans la bonne direction, et tous dans la meme direction, celle du puits. Faire attention a ne pas laisser un pauvre petit agneau tout seul loin de sa maman. Les chiens, qui se sont habitues a nous, me suivent. Seul Cual m'aide a faire le tour du troupeau. Les berbis assoiffees se bousculent pour boire un coup, belant a coeur joie. Une fois le puits devaste, on peut s'asseoir, mission accomplie. Reste maintenant a les faire rentrer dans leur enclos, mais c'est plutot facile, une fois le soleil couche, elles savent ou il faut aller dormir. On donne a manger aux chiens et a demain les amis!

Le jour suivant, le neveu de Doña Cristina vient nous chercher, nous disant que l'agneau est tue, cuisine, et pret a manger. Pas de pitie pour le pauvre choupi, ca fait tellement longtemps qu'on a pas mange aussi bien! Un vrai delice! Je lance mes chuños aux chiens qui les renient eux aussi. La patate congelee et decongelee bolivienne, de couleur noiratre, n'a pas un gout tres raffine!
On passe encore quelques jours paisibles en compagnie de Doña Cristina, plus que ravie d'avoir de la compagnie et de se reposer un peu, sans avoir a tirer l'eau du puits, a courir apres les brebis. Nous, on l'aide le sourire aux levres, profitant de l'experience et de sa gentillesse.

Quand vient le moment de partir, elle nous invite a passer la nuit et la journee suivante dans sa maison a Machacamarca, on accepte et profite de pouvoir laver des habits et nous laver nous memes, dans la cour de sa petite maison. A Machacamarca, elle a la tele, l'eau courante, l'electricite. Elle aimerait bien nous voir rester, mais la route nous appelle. On se dit aurevoir simplement, sans frous frous, tous plus reconnaissants, enrichis et heureux les uns que les autres, et sa benediction nous suit encore aujourd'hui.









PS : Les taches noires sur les photos m'embetent bien plus que vous, croyez-moi, mais je ne peut rien y faire, elles sont a l'interieur de l'objectif. A partir de maintenant, il y aura des ovnis sur presque toutes les photos, bien malheureusement... tentez d'en faire abstraction, svp.

dimanche 21 septembre 2008

Oruro


Premier reel point de chute en Bolivie : la ville d'Oruro, qui nous permet de nous plonger dans le pays. On monte dans un "mine" (transport public, mini bus) pour aller dans le centre, et la circulation folle nous fait croire trois fois qu'on va mourir, mais non, ni les deux boum dans la mine d'en face, ni la pente raide qu'on descends a vitesse folle ne nous laisseront ni un bleu. C'est dur a croire, mais les chauffeurs savent ce qu'ils font!
Arriver de nuit, ce n'est pas si mal, tout bien reflechi. On debarque en plein mileu du campero, le marche de la ville. En realite, Oruro tout entier est un marche geant. Les odeurs d'huile a frire, de transpiration et d'epices, la circulation folle, la foule agitee et compacte, le bruit des klaxons et des gens qui se bousculent et crient le prix de leurs produits, tout ca, d'un seul coup, nous laisse la, en plan, sac au dos. Vite, vite, Seba, trouvons une chambre pour poser les affaires et aller se plonger la-dedans!

De jour, la ville est exactement la meme, sauf qu'il fait jour. je prends vite gout a me perdre dans ce marche geant ou chaque rue a une specialite. Non, les fruits et les chapeaux ne se melangent pas, ici. Fruits, legumes, pain, boissons, cigarettes, chapeaux, shamppoings, meubles, outils, CDs, vetements, tissus, chaussures,viande, instruments, papiers, chacun sa rue et c'est plutot pratique, du moins quand on sait ou se trouve la rue qu'on cherche! Tout est trouvable au campero, et il y a des stands assez droles, par exemple celui-ci qui vends uniquement des chaussures de poupee barbie. Il y ceux qui ont des stands geants, et ceux qui sont la par terre avec leurs 3 kilos de carottes. Il y a ce gars aussi, qui se pose avec sa balance et pese les gens pour 50 centavos. Et ceux qui se promenet avec des DVDs ou des boucles d'oreilles et qui hurlent "2 pesos!! baratito, baratito!!" sans s'arreter. Il y a le train aussi, qui passe en plein milieu du marche deux fois par jour, son conducteur faisant coucou de la main par la fenetre. Enfin, il y a ce qu'il faut pour pouvoir se promener le sourire aux levres, sans se soucier d'avoir perdu la direction de l'hotel.

Ca fait du bien d'etre dans un nouveau pays, mine de rien. L'accent change, les gens parlent a l'envers, comme Maitre Yoda! Et puis, ils prononcent les S a la fin des mots et tout ca, mais c'est trop tard pour moi, le mauvais accent chilien, je l'ai deja! La monnaie change et le cout de la vie aussi, la Bolivie est definitivement bon marche et on se paye des restos populaires pour trois fois rien. Les gens et la mode sont bien differentes du Chili egalement. Racines indigenes pour sur, je me sens plus blanche et blonde que jamais! La Bolivie parait etre entre deux mondes, la plupart des femmes sont habillees traditionnellement, jupons a gogo, tresses longues et chapeau melon, mais beaucoup sont en jean et decollette aussi. Les jeunes achetent des piercings pendant que les plus vieux achetent des foetus de lamas seches pour pratiquer je ne sais quelle vieille sorcellerie. Le melange est interessant.







dimanche 14 septembre 2008

En route pour la Bolivie!!




Et c'est apres sept mois au Chili que je me decide enfin a traverser une frontiere... A nous la Bolivie, et tchao a mon nouveau pays d'adoption!

On quitte Iquique avec, pour changer, une direction nouvelle : l'Est! Ma chance d'auto stoppeuse jeune blonde seule avec son sac a dos s'arrete a ce moment de mon existence, mais qu'importe l'attente si on peut la partager avec un compagnon? On arrive en une apres midi a Huara, on l'on quitte cette bonne vieille Ruta 5 en direction de Colchane, village frontiere. Trois camions passent sans s'arreter et le soir tombe, c'est au km 3 qu'on plantera la tente. Le lendemain, on tends le pouce a nouveau. On nous avait dit que ce passage Chili - Bolivie n'etait pas le plus frequente et c'est bien vrai, mais en trois camionettes on arrive quand meme a quelques 100 km de Colchane. Du restaurant ou nous a laisse notre dernier sauveur, Seba va parler avec un chauffeur de camion bolivien et nous degotte un belle place a l'arriere du camion. En effet, le camion transporte des voitures d'occasion et accepte de nous faire monter dans l'une d'elles! Luxe total, on a une voiture entiere pour nous sans avoir besoin de la conduire! Defile le paysage, doucement mais surement, magnifique, montagnes colorees, rochers demesures, troupeaux de lamas et soleil couchant. Le camion nous laisse peu avant la frontiere, qu'on traverse a pied de nuit, arrivant le 29 Aout a Pisiga, en Bolivie!!

On se rappellera de notre premiere nuit en Bolivie, pour le mal de crane qui nous bouffe le cerveau, les tympans, les yeux, le cou, tout partout. Pisiga se trouve a presque 4000 metres d'altitude et il nous faut une nuit de souffrance pour nous y habituer! le manque d'air non plus n'est pas une blague et on a du mal a respirer a chaque moindre effort. Ca nous prendra deux semaines pour nous habituer entierement a l'altitude et pouvoir respirer correctement.
Pisiga, c'est tout petit et proportionnellement bien trop rempli de militaires. On part a pattes le lendemain matin, et s'arrete un autre camion qui nous fait monter dans une voiture a l'arriere! Finalement, ca a l'air commun comme moyen de transport en Bolivie. S'il y a un desavantage, c'est la lenteur du camion sur la route non pavee, qui fait qu'on arrive a Oruro, qui se trouve a un peu plus de 200 km, apres 7 heures de voyage! Sept heures donc pour profiter du paysage. L'altiplano bolivien, d'apres son nom, est haut et plat. On passe pas loin du Salar de Coipasa, blanc comme neige, et puis roule le paysage et sa platitude, jaune, rempli de lamas et ponctue de petits villages avec des maisons aux briques de boue et toits de paille. Commence le depaysement... qui jamais ne termine dans ce pays.